Home Haiti 1985-2025 : Haïti 40 ans de chaos

1985-2025 : Haïti 40 ans de chaos

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Les récents évènements survenus sur la scène politique haïtienne ces derniers mois, illustrent à quel point divers secteurs et leurs protecteurs occidentaux œuvrent depuis plus de quarante ans à la destruction complète du pays. La situation sociopolitique actuelle rappelle ce qui s’est passé entre 1984 et 1985 sous le régime dictatorial de Jean-Claude Duvalier, lorsque celui-ci organisa un référendum le 22 juillet 1985 pour amender la Constitution de 1983.

A ce moment-là déjà, l’ambassade américaine apporta son plein soutien à l’organisation de ce scrutin. Le jour de la fête nationale américaine, le 4 juillet 1985, l’ambassadeur de l’administration Reagan en Haïti, Clayton E. McManaway Jr., déclara même à ses invités qu’il s’agissait d’un « pas encourageant ». Cette mascarade qui renforça le pouvoir de Jean-Claude Duvalier, fut largement considérée comme un scrutin entaché de fraudes et d’irrégularités. Elle provoqua une vague d’indignation nationale et internationale, engendrant un mécontentement et une révolte populaires généralisés.

Le 28 novembre 1985, l’armée et les Tontons Macoutes ouvrirent le feu sur la foule protestant contre le régime et son référendum. Plusieurs personnes furent tuées, dont trois lycéens des Gonaïves : Daniel Israël, Jean-Robert Cius et Mackenson Michel. Le 7 février 1986 avant de partir en exil, Duvalier, cherchant à accroître son influence, mit en place son propre gouvernement de transition, composé de militaires et de civils. Après la chute des Duvalier, la domination impérialiste américaine continua avec un Conseil national de gouvernement (CNG), qui après avoir instauré une nouvelle Constitution, organisa les élections, dont les premières éditions furent annulées à cause d’un massacre sanglant d’électeurs.

Le second essai fut marqué par l’ascension fulgurante de Leslie François Manigat, à la faveur d’une « percée Louverturienne », au milieu de cadavres et du sang de ses compatriotes. Le pays connut alors une succession de coups d’État militaires jusqu’à ce qu’un Conseil d’État instaurât la formule d’un membre de la Cour de cassation, avec la juge Ertha Pascal-Trouillot comme Présidente provisoire de la République.

il n’y a pas de transition réelle. Il s’agit d’une prise illégale du pouvoir par une clique d’oligarques qui s’enrichissent en pillant le pays appauvri.

Les Américains aidèrent alors Mme Trouillot à organiser les élections du 16 décembre 1990, que le Curé de l’église Saint-Jean Bosco, Jean-Bertrand Aristide remporta grâce au soutien populaire et devenant ainsi le premier Président démocratiquement élu de l’après Duvalier.

Moins d’une année plus tard, le 30 septembre, il fût renversé par l’oligarchie et contraint à l’exil. L’armée et la police haïtienne flanquées d’un groupe paramilitaire, Front révolutionnaire pour l’avancement et le progrès d’Haïti (FRAPH), dirigé par Emmanuel « Toto » Constant et Louis Jodel Chamblain, à la solde de la CIA, assassinèrent des dizaines de milliers de personnes.

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Trois ans plus tard, le 19 septembre 1994, les États-Unis intervinrent avec 20 000 Marines et rétablirent Aristide au pouvoir sous le slogan fallacieux du « retour de la démocratie ». Le 6 février 1995, sous la pression de l’impérialisme américain, Aristide dissout l’armée et la remplace par une force de police.

Son ex-Premier ministre, René García Préval, lui succéda à la présidence le 23 décembre 1995. Le parti Fanmi (Famille) Lavalas d’Aristide remportait les élections législatives du 21 mars 2000, auxquelles participèrent certains partis d’opposition. Le 26 novembre 2000, Jean-Bertrand Aristide est à nouveau élu Président, succédant cette fois à René Préval, lors d’une élection boycottée par les principaux partis d’opposition.

Des manifestations anti-Aristide ont éclaté à travers le pays, notamment à Port-au-Prince, soutenues par le Groupe des 184 (G 184), dirigé par les hommes d’affaires, André (Andy) Apaid Junior, Charles-Henri Baker et d’autres partis issus de la coalition politique Convergence démocratique, exigeant sa démission immédiate.

Un groupe armé se réclamant de la rébellion, mené par l’ex-Commissaire de police Guy Philippe et le récidiviste Louis Jodel Chamblain, a pris le contrôle de plusieurs chefs-lieux des départements du pays, entre autres, les Gonaïves, Hinche et le Cap-Haïtien, le 24 février 2004. Quelques jours plus tard, soit le 29 février 2004, un commando d’agents du «contre-terrorrisme» de la CIA enleva le Président Aristide et sa famille pour les exiler en République centrafricaine.

Par la suite, l’impérialisme installa un gouvernement de transition allant du 9 mars 2004 au 9 juin 2006, sous la Présidence de Boniface Alexandre, juge à la Cour de cassation et d’un Premier ministre, Gérard Latortue, venu de la diaspora haïtienne des Etats-Unis. Cette transition, sous occupation américaine et sous la protection des forces des Nations-Unies, a organisé des élections et réinstallé une seconde fois René Préval à la présidence.

En mai 2011, le Président Préval à l’issu de son mandat devait passer le pouvoir au musicien Michel Joseph Martelly sous la pression intense du Département d’État américain, alors dirigé par Hillary Clinton. A l’expiration de sa présidence, une nouvelle transition politique s’en est suivie, présidé par le sénateur Jocelerme Privert, qui a organisé le scrutin présidentiel de 2016 au cours duquel Jovenel Moïse, du PHTK de Martelly, sortait victorieux et a pris le pouvoir jusqu’à son assassinat le 7 juillet 2021.

Depuis, le pays a connu une succession de transition impérialiste. D’abord avec le Premier ministre Claude Joseph. Ensuite, il y a eu Ariel Henry, qui est resté au pouvoir pendant 33 mois sans rien accomplir, jusqu’à son renversement en février 2024 par la population soutenue par des groupes armés. Les pays occidentaux, notamment les États-Unis, ont œuvré à «une combinaison» de l’OEA, de l’ONU, de l’Union européenne et de la CARICOM comme sous-traitant pour établir un Conseil Présidentiel de Transition (CPT) de 9 marionnettes, toujours en place et qui manigance avec l’espoir de rester au pouvoir au-delà de son mandat fixé pour le 7 février 2026 par l’Accord du 3 avril 2024. Le CPT et son gouvernement dirigé par Alix Didier Fils-Aimé ont fait des promesses électorales pour le mois d’août 2026.

Des promesses que ces dirigeants, anciens comme nouveaux, n’ont jamais tenues puisqu’ils veulent justement garder le plus longtemps possible les rênes du pouvoir. De plus, rien ne laisse présager que cette transition prendra fin un jour, tant les membres de la classe politique et économique l’exploitent comme une vache à lait pour s’enrichir.

Présentement, il n’y a pas de transition réelle. Il s’agit d’une prise illégale du pouvoir par une clique d’oligarques qui s’enrichissent en pillant le pays appauvri. Les masses populaires doivent prendre leurs responsabilités face à l’arrogance de ce régime, un ramassis de réactionnaires et d’assassins dont l’objectif est de plonger le pays au plus profond de l’abîme tout en déniant au peuple le droit de construire son destin.

Quarante années durant lesquelles toutes les industries nationales du pays ont été privatisées, décimées ou plongées dans une anarchie perpétuelle. Les deux seules satisfactions de la population durant cette période ont été la construction du canal d’irrigation KPK sur la rivière Massacre, que l’État haïtien continue d’ailleurs de saboter au profit du Président dominicain Luis Abinader et la semaine dernière, les joueurs de la sélection nationale de football – les Grenadiers –  qui, malgré de nombreux obstacles, sans aucun appui du secteur économique et aucun soutien de l’État corrompu, sont parvenus à se qualifier pour la Coupe du monde de 2026. Un exploit qu’il faut saluer !

La classe politique bourgeoise réactionnaire et le système capitaliste ont transformé la jeunesse des ghettos en une entreprise criminelle, les poussant à se livrer à des enlèvements contre rançon pour assurer leur survie. Pendant quarante ans, la misère et le chômage n’ont engendré que des bandes armées.

Depuis que l’État haïtien, la bourgeoisie et les impérialistes ont perdu le contrôle de certains groupes armés, ils ont rapidement recruté d’autres jeunes sans emplois et marginaux sous le nom de Brigadier. L’enlisement meurtrier, la confrontation quotidienne, ce sont les seules nouveautés qu’ils ont créées dans le pays, et qui ne font qu’exacerber la pauvreté, l’insécurité afin que l’homme haïtien continue d’être un loup pour son semblable. Quarante ans d’échec où tout fait défaut.

La situation du pays demeure une source de vives inquiétudes. Au lieu de s’améliorer, elle risque de se détériorer davantage et nul ne sait jusqu’où ni quand ni comment cette calamité prendra fin de sorte que le peuple puisse se savoir soulagé. Le train du chaos déferle à toute vitesse et rien ne semble pouvoir l’arrêter, sauf une révolte populaire qui, en mettant le feu aux poudres provoquera peut-être une révolution sociale.

De 1985 à fin 2025, Haïti a perdu manifestement quarante ans qu’il aura du mal à rattraper. Quarante années gâchées, durant lesquelles le pays a connu une régression totale. Un cercle vicieux !

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