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La recette de Fils-Aimé n’a pas marché

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L’Edito du Rezo

Le voyage de courte durée d’Alix Didier Fils-Aimé à Washington devait être l’occasion pour lui de démontrer à ses interlocuteurs étrangers qu’il gardait la maîtrise d’une situation nationale chaotique. Loin d’être un simple déplacement diplomatique, ce séjour s’inscrivait dans une stratégie calculée : prouver qu’il était en mesure de contenir les gangs et d’ouvrir la voie au référendum in) constitutionnel – note de Barreau de Port-au-Prince – et aux élections. Or, cette démonstration de force n’a pas résisté à l’épreuve des faits ; la prétendue « recette » de Fils-Aimé a montré ses limites dès son retour à Port-au-Prince.

Selon plusieurs témoignages locaux, le plan avait été mis en branle avant son départ : des arrangements secrets auraient été passés avec les gangs qui occupaient des positions stratégiques, notamment le centre Téléco à Kinskof. De même, des discussions avaient été évoquées concernant Solino, quartier emblématique du centre-ville livré depuis longtemps aux bandes armées terroristes. L’objectif affiché était de permettre à des déplacés de « rentrer » chez eux, sous prétexte que la normalité était en train de revenir. Cette mise en scène servait surtout à renforcer, à Washington, le discours d’un État qui reprendrait progressivement le contrôle de ses territoires perdus.

Mais la mise en scène s’est rapidement effondrée. Des familles déplacées, convaincues par ces assurances, ont tenté de regagner leurs habitations. À Solino, le constat fut accablant : maisons pillées, incendiées, défigurées par les violences. Les images rappelaient davantage les ruines de la guerre en Ukraine que le retour à la paix promis. La désillusion a été immédiate et les dénonciations publiques se sont multipliées : on accusait Fils-Aimé d’avoir manipulé les plus vulnérables, en se servant de prétendus porte-parole pour leur transmettre de fausses garanties.

Face à ce fiasco, la manœuvre de sauvetage a été confiée à Vadimir Paraison. Ce dernier, en publiant une note officielle de la Police nationale d’Haïti (PNH) expliquant que les conditions sécuritaires ne permettaient pas encore le retour des habitants, a cherché à couvrir l’échec du Premier ministre de facto. Or, en procédant ainsi, il a politisé à outrance l’institution policière : la PNH s’est retrouvée transformée en instrument de communication politique, alors qu’elle aurait dû rester neutre. Pire encore, M. Paraison a aggravé la confusion en exhibant sa proximité avec Fils-Aimé à travers des photographies de rencontres officielles, renforçant l’idée que l’appareil sécuritaire sert de bouclier à un chef de gouvernement fragilisé.

Ces fautes de communication, répétées en moins d’une semaine, traduisent une dérive inquiétante. La PNH perd en crédibilité et se voit instrumentalisée dans un jeu politique où la priorité n’est plus la sécurité publique, mais la sauvegarde d’un pouvoir vacillant, corrompu et défaillant. La « recette » de Fils-Aimé, fondée sur la négociation opaque avec les gangs et la manipulation symbolique des déplacés, s’est révélée non seulement inefficace mais dangereuse. Elle fragilise davantage les institutions et révèle la faillite d’une gouvernance qui préfère l’illusion de contrôle à l’exercice réel de l’autorité républicaine.

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