
« Arrêter de parler de la destitution du Premier ministre et s’occuper plutôt de la publication du calendrier électoral ». C’est-ce qu’auraient déclaré l’ambassadeur du Canada en Haïti André François Giroux et le chargé d’affaires américain Henry T. Wooster, au conseiller présidentiel Fritz Alphonse Jean. Ce dernier a fait savoir que ces diplomates ont exercé des pressions sur lui pour qu’il renonce à toute initiative visant à remplacer le Premier ministre.
Certes, le conseiller a été bel et bien sanctionné le lundi 24 novembre 2025 par le département d’État américain après avoir refusé sans doute de se plier à ses injonctions. Les propos présumés tenus par les ambassadeurs ont été justement ratifiés le lundi 1er décembre 2025 lors d’un conseil des ministres en présence de cinq membres du Conseil Présidentiel de transition (CPT), dont les trois braqueurs de la Banque nationale du Commerce (Louis-Gérald Gilles, Smith Augustin, et Emmanuel Vertillaire).
De connivence avec les puissances tutrices dominantes et avec le soutien des braqueurs, le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé et sa clique de ministres dans un conseil de ministres amputé de la légitimité présidentielle viennent de faire adopter le décret électoral.

Ainsi, les complices du CPT dont l’actuel coordonnateur Laurent Saint Cyr, ont exécuté à la lettre l’ordre de leur patron en publiant dans le journal Le Moniteur le décret du Conseil électoral provisoire préparé pour les élections présumées. Ce n’est ni la première ni la dernière fois qu’un décret électoral a été publié, mais cela ne garantit en rien que leurs intentions avouées pourront être réalisées. D’ailleurs, la situation est déjà mal engagée car toutes les décisions qui devaient être prises dans le pays, notamment sous la présidence du CPT, sont à la majorité qualifiée de 5 voix sur 7.

Il n’y avait que 6 conseillers présents. Mais, malgré le marronnage sans doute des 3 autres conseillers présidentiels en l’occurrence Edgard Leblanc Fils, Fritz Alphonse Jean, et Leslie Voltaire pour ne pas signer l’acte électoral, Laurent saint Cyr l’a légitimé et l’a mis en œuvre par sa publication au journal officiel de la République d’Haïti : le Moniteur.
Tout heureux comme si tout a été bien fait, le conseiller Frinel Joseph, qui n’a pas de droit de vote, responsable du dossier électoral au sein du CPT, a rapidement déclaré sur son compte X : « Ce lundi 1er décembre 2025 marque un tournant décisif dans la transition. Par l’adoption, par le Conseil des ministres, du projet de décret électoral, le CPT et le gouvernement dotent le pays de l’instrument juridique et politique nécessaire à la tenue d’élections permettant aux citoyens de choisir leurs représentants conformément à la Constitution, aux principes démocratiques et à l’Accord du 3 avril 2024 ».
Le Premier ministre lui-même enchaina dans le même sens dans un communiqué : « Cette adoption constitue une étape majeure et décisive dans l’engagement clair et réaffirmé du CPT et du gouvernement à organiser des élections dans les plus brefs délais, conformément aux aspirations légitimes de la population et aux principes républicains ».

Ce qu’il faut comprendre dans cette affaire, c’est le rôle des ambassades américaine, française et canadienne. Ce ne sont pas les autorités elles-mêmes qui décident d’avancer ainsi. Il s’agit d’un ordre qu’elles exécutent, leur employeur politique leur en donne la garantie, elles n’ont rien à craindre, il les soutient. Qui se sent morveux, qu’il se mouche!
Avec cette mesure, les membres récalcitrants du CPT n’auront aucun pouvoir. Ils peuvent continuer à recevoir leurs salaires et leurs frais jusqu’à la date d’échéance du 7 février 2026. Le Premier ministre n’a plus besoin d’eux, ce qui compte le plus pour Fils-Aimé, son collègue de la bourgeoisie patripoche ne l’avait pas lâché sur cette pente dangereuse. Est-ce la colère des grenouilles dont les dissidents Edgard Leblanc, Leslie Voltaire et Fritz Alphonse Jean qui cherchent à tromper le peuple pour que leurs partis politiques obtiennent un quelconque soutien populaire et puissent ainsi participer aux élections en se faisant passer pour des victimes des autorités qui se maintiendront au pouvoir ? Ces gens sont des escrocs, car rien de ce qu’ils font n’est sans calcul pour leur propre intérêt. Toutes ces lamentations de Fritz Jean, quand il prétendait avoir été humilié par ses amis ambassadeurs peuvent être du camouflage afin de se dédouaner de son sale et vil rôle au sein du CPT.
De toute façon, s’il y a un problème entre eux, il ferait mieux que Fritz le discute avec ses collègues du CPT et leur patron qui les avaient embauchés. D’ailleurs pourquoi n’avait-il pas limogé le Premier ministre lors de son passage comme coordonnateur du Conseil ? Il a passé sans heurts le pouvoir à Saint Cyr et c’est maintenant qu’il commence à faire ses marchandages. N’est-il pas en train de se moquer du peuple ?

A quoi le pays va-t-il faire face dans les prochains jours ? La Primature a répondu ainsi dans un communiqué : « Le chef du gouvernement rappelle que le cap est désormais clairement fixé : la priorité absolue est l’organisation imminente des élections. Toutes les ressources de l’État seront mobilisées à cette fin. La publication du décret électoral dans Le Moniteur, journal officiel de la République d’Haïti, constitue un signal fort adressé à la nation et à la communauté internationale : le Gouvernement et le CPT agissent avec responsabilité, détermination et engagement pour assurer le retour à une gouvernance pleinement démocratique ».
Ce problème de publication du décret électoral n’empêchera pas aux partis politiques de s’y joindre et de collaborer. Ces opportunistes de la classe politique ne pensent même pas à cela maintenant. Ils ont les os électoraux pour s’amuser et de plus, en bons corrupteur le Premier ministre les a déjà gagnés dans son camp avec la promesse que le gouvernement financerait les partis. Les partis comptant 50 % de femmes candidates et 2 % de candidats handicapés recevront un surplus d’une augmentation de vingt-cinq pour cent (25 %) du financement public lors des prochaines élections législatives, conformément à l’article 188 de la Constitution.
On entend déjà parler de retour à l’ordre constitutionnel, ce qui signifie que les colonisateurs occidentaux sont dans leur élément : tout se met en place pour eux, de sorte que le train revienne à son point de départ. Autrement dit, rien ne changera vraiment, car il n’y a jamais eu de transition. Et les mêmes manœuvres politiques honteuses et douteuses vont se poursuivre toujours sous la domination des puissances impérialistes.













