
Pour comprendre l’arrestation puis l’emprisonnement du pasteur Moïse Joseph le jeudi 25 septembre 2025, il faut remonter à l’époque de la construction du canal d’irrigation à Ouanaminthe. La décision populaire qui a poussé à la construction de ce projet a rencontré toute sorte d’opposition non seulement de notre pays voisin, la République dominicaine, mais, plus triste encore, du gouvernement haïtien lui-même qui n’a pas soutenu le projet, préférant s’y opposer jusqu’à ce jour.
Le pasteur était président du comité du canal, avec une équipe solide, ayant le soutien et la solidarité haïtienne partout, à l’intérieur comme à l’extérieur, ce qui a permis l’existence du canal KPK aujourd’hui. Depuis lors, le pasteur Joseph a été la cible d’assassinats, tant de la part des classes exploiteuses et gouvernementales dominicaines que des laquais de l’impérialisme américain au sein des classes exploiteuses du gouvernement en Haïti.
C’est sous le gouvernement de facto du Premier ministre Ariel Henri que le projet du canal a débuté. Depuis lors, l’État haïtien n’a jamais apporté aucune contribution ni même aidé la population dans cette entreprise dont l’objectif est unique : permettre aux agriculteurs de trouver de l’eau pour faciliter le développement de l’agriculture et de la production nationale. Ce projet d’irrigation à Ouanaminthe, dans le Nord-Est d’Haïti, s’avère important pour diminuer la dépendance alimentaire du pays vis-à-vis de la République Dominicaine et également des Etats-Unis d’Amérique. Une telle entreprise visant à arroser 3 mille hectares de terre dans la vaste plaine de Maribahoux, qui produit du riz, du maïs et d’autres types de produits alimentaires fait tiquer la petite bourgeoisie haïtienne, antinationale, qui n’hésite pas à conspirer avec la République dominicaine pour détruire la production nationale haïtienne.
Le pasteur Moïse Joseph a dirigé le projet du canal jusqu’à son achèvement. L’eau du canal désormais commence à irriguer les terres des paysans. Ce fut une grande victoire pour la paysannerie haïtienne et cela a montré qu’avec la volonté et la détermination populaire, le peuple peut faire de grands miracles. Depuis la réalisation du canal KPK, la région est aujourd’hui en plein essor grâce à la production rizière qui a augmenté les revenus des agriculteurs locaux de plus de 35 % et revitalisé l’économie haïtienne.

D’une certaine manière, cela a encouragé les agriculteurs Haïtiens à produire chez eux tous les produits alimentaires qu’ils ont l’habitude d’aller se procurer en République Dominicaine. D’autant plus qu’ils n’allaient plus vendre leur main-d’œuvre pour une pitance couronnée de toutes sortes d’humiliations. Leur plus grande réussite a été de permettre au peuple de manger son propre riz, un riz organique qui a mis fin au riz étranger, dont les États-Unis et la République dominicaine ne cessent de dumper dans le pays.
Drôle d’ironie, cela ne plaît pas au gouvernement haïtien dans la mesure que cela diminue en quelque sorte l’économie dominicaine qui misait complètement sur la consommation haïtienne.
C’est dans ce contexte que nous comprenons que leur première tentative concernant le canal a consisté à créer des tensions entre la plupart des citoyens qui se trouvaient au timon de l’administration du canal. On a créé un fossé entre eux, les poussant à se battre l’un contre l’autre. Ils les ont complètement désunis. De cette façon, ils sont devenus faciles à attaquer et à leur faire payer leur arrogance d’avoir défié l’ordre des héritiers sans doute du pays que nos ancêtres nous ont légué. La première victime a été le président du comité du canal. Ils ont tenté de l’accuser d’un faux accident de voiture qu’il aurait provoqué. Or, l’avocat du meurtre commis dans le Nord-Est, sans procès, lui a déjà réclamé une importante somme d’argent pour indemniser les familles des trois personnes décédées dans l’accident. Bien que Moïse n’ait pas été impliqué dans l’accident, c’est sa voiture qui a été impliquée, ils lui ont réclamé 60 millions de gourdes (environ US $462 000 dollars)
Les grands potentats et manitous de tout acabit voyant qu’ils ne pouvaient pas le piéger suite à un accident mortel survenu le 21 août, lorsqu’un camion du pasteur aurait percuté une moto, tuant trois jeunes hommes. Un mois après, ils ont fomenté un autre complot criminel en assassinant en pleine rue l’un des avocats du réseau qui le pressaient de payer davantage d’argent, et parmi eux Me Albert Joseph, un avocat réputé à Ouanaminthe et membre de l’Association des avocats de Fort Liberté.
Sans enquête, la justice a arrêté le pasteur chez lui, malgré la reddition des véritables criminels, sans l’impliquer dans quoi que ce soit car le pasteur était l’homme recherché. Depuis lors, il est retenu en prison sans raison ainsi que Michelle Adrien, épouse du président de l’Association régionale des avocats. Cette action de la justice du Nord-est, n’est pas gratuite. Vue la corruption qui sévit dans le pays, des pots de vin pourraient bien être distribués aux juges. Même le juge qui l’a entendu n’a pas le pouvoir de décider de sa liberté puisque l’ordre est venu d’en haut, d’une main invisible c’est-à-dire des grands flibustiers de la politique liés aux oligarques contrôlant l’économie du pays.

Les deux plus grands crimes de Moise sont le Canal sur la rivière Massacre et l’usine rizicole KPK. La bourgeoisie revendeuse ne voit pas d’un bon œil de telles entreprises nationales. Voilà pourquoi l’un de leurs objectifs criminels est de fermer l’usine de riz KPK, fondée par le pasteur et qui commençait à s’implanter profondément dans le pays. Il a fourni des emplois à de nombreuses personnes afin qu’elles n’aient pas à se rendre chez leurs voisins de la République Dominicaine pour être humiliées. La seule erreur du pasteur a été de penser qu’il pourrait produire à haut niveau afin d’envahir le marché haïtien jusqu’à exporter le riz à l’extérieur. Mais pour les décideurs d’Haïti, le pays n’a aucune nécessité de produire. Ils ont réduit Haïti à un état de pays consommateur mais qui n’a pas le droit de produire. Alors un pays qui ne produit pas, ne peut accéder à aucune forme de développement économique. Le pire d’ailleurs est le taux de chômage exagéré car le peuple ne peut même pas acheter pour manger puisqu’il ne travaille pas.
Si quelqu’un veut comprendre l’état d’insécurité dans lequel vit le pays, ceci est un exemple concret d’insécurité alimentaire où les chômeurs éternels ne peuvent rien faire et l’Etat se fiche d’eux, ne leur donnant aucune aide sociale.
Malgré le choc et la peur, les habitants de Ouanaminthe continuent de se mobiliser, exigeant justice et transparence dans cette affaire et surtout la libération du pasteur afin qu’il puisse reprendre ses activités.
Les manifestations de soutien au pasteur se multiplient. Quand ce ne sont pas les religieuses des églises protestantes, ce sont les résidents de Ouanaminthe qui marchent dans les rues pour exiger sa libération.
Comme la majorité du peuple haïtien, nous de Haïti Liberté dénonçons de toute nos forces l’emprisonnement illégal d’un entrepreneur, producteur industriel haïtien, le pasteur Moïse Joseph. Pour reprendre un slogan antifasciste en usage dans le camp républicain durant la guerre civile espagnole : No pasarán ! Ils ne passeront pas !











