Flashback — janvier 2022. Jacques Desrosiers, la presse divisée face au CEP d’Ariel Henry.
2023 « Organiser des élections n’est pas la priorité. C’est au gouvernement de garantir que, dans un délai donné, la situation s’améliorera. » — Jacques Desrosiers, secrétaire général de l’AJH
à lire le texte original: CEP illégitime et Guerre intestine dans la presse traditionnelle : le président de l’AJH traite de coquins indécents, les patrons de médias de l’ANMH et de l’AMIH
Le ton avait monté, début 2022, entre journalistes et patrons de médias autour du Conseil électoral provisoire que le gouvernement de facto d’Ariel Henry s’efforçait de constituer sous le regard appuyé du Core Group. Au cœur de la querelle : Jacques Desrosiers, secrétaire général de l’Association des journalistes haïtiens (AJH), écarté du processus de désignation du représentant de la presse.
S’estimant trahi par ses pairs, Desrosiers dénonçait alors un « stratagème mafieux » mené, selon lui, par les dirigeants de l’Association nationale des médias haïtiens (ANMH) et de l’Association des médias indépendants (AMIH). Il accusa ces structures de manipuler la procédure pour imposer un candidat « inconnu du secteur », Marco Mondésir, choisi à la faveur d’une réunion tenue dans les locaux de Radio Métropole à Delmas. « C’est le représentant de l’AMIH et de l’ANMH, pas celui de la presse », avait-il martelé, amer.
Derrière la colère, une lutte d’influence révélait les fractures d’un secteur médiatique déjà fragilisé par les violences et la perte de crédibilité publique. Le désaccord dépassait la simple querelle de postes : il interrogeait la légitimité des acteurs médiatiques à cautionner un processus électoral jugé illégitime et téléguidé par des partenaires étrangers.
Tout en répétant que « le pays ne peut pas passer cinq ans dans la transition », Desrosiers insistait néanmoins sur la priorité absolue : le rétablissement d’un climat sécuritaire avant toute élection. « Organiser des élections n’est pas la priorité. C’est au gouvernement de garantir que, dans un délai donné, la situation s’améliorera », déclarait-il alors, cherchant à préserver une ligne d’équilibre entre réalisme et devoir démocratique.
Cette passe d’armes, oubliée par beaucoup, illustre la tension permanente entre la rhétorique électorale et l’impossibilité matérielle de voter dans un pays pris en otage par la peur. Trois ans plus tard, les mêmes acteurs s’y affrontent encore, à peine changés par le temps — sinon par la lassitude.