Toujours engagées pour la cause des femmes
8 mars 1986 – 8 mars 2025 : 39 ans de luttes féministes continues
A la chute de la dictature des Duvalier en 1986, le mouvement féministe haïtien a connu une résurgence symbolisée par la Marche historique des femmes du 3 avril. Le mouvement a su s’imposer progressivement sur l’échiquier politique national au cours des années 1990 et 2000. Très peu d’organisations se réclamaient alors ouvertement du féminisme, présenté de manière caricaturale comme un mouvement de femmes aigries détestant les hommes. Les avancées enregistrées en matière de droits des femmes, grâce aux luttes féministes, ont toutefois été largement appropriées et soutenues par des groupes féminins.
Il a fallu beaucoup d’actions des féministes pour contrecarrer la tendance à occulter le véritable sens du 8 mars, Journée internationale des droits des femmes, et celui d’autres dates symboliques. Banaliser, minimiser, dépolitiser les luttes féministes procède d’une démarche de récupération qui s’est particulièrement accentuée suite au séisme de 2010, à travers les interventions des autorités haïtiennes et de la communauté internationale. L’orientation entre autres adoptée est de présenter la violence de genre comme étant le seul véritable problème des Haïtiennes. Lorsque, par exemple, la participation politique est soulevée, elle est abordée dans un registre réducteur de présence féminine victimaire, sans un discours en lien avec les intérêts stratégiques des femmes et encore moins avec ceux de la société toute entière.
Encore une fois, ce 8 mars survient dans un contexte sociopolitique et sécuritaire des plus dégradé. En particulier, dans la région métropolitaine de Port-au-Prince et dans l’Artibonite, la population en détresse ne cesse de fuir ses lieux de vie, lorsqu’elle a pu échapper aux sanglantes tueries. Les droits humains sont ignorés, notamment le droit à la vie, à la santé, au logement, au travail. Le fonctionnement de diverses organisations de défense des droits des femmes s’en ressent et des militantes sont affectées par les déplacements forcés. Les drames que vit la population ne sont considérés par les autorités gouvernementales que l’espace d’une annonce sans aucun effet. Leurs énergies sont plutôt consacrées aux luttes de pouvoir, aux tractations en tous genres, aux inutiles et coûteux déplacements, et surtout pourtenter de donner l’illusion d’une transition qui suivrait son cours normal. En matière de condition féminine, c’est l’instrumentalisation et la visibilité d’actions cosmétiques qui prévalent.
Les entraves à la liberté de circulation, imposées par les agissements des gangs armés criminels, rendent difficiles les mache kontre, les rencontres d’échanges entre organisations de femmes de différentes régions. Les organisations féministes ne se laissent pas pour autant réduire au silence. Elles continuent à œuvrer pour préserver leur capacité d’agir. Le 8 mars est pour nous une occasion de réaffirmer notre indéfectible engagement en faveur du respect des droits de la personne, dans le combat pour l’égalité qui trouve son sens dans la cause des femmes.
Les droits des femmes sont des droits humains inaliénables !
Port-au-Prince, le 7 mars 2025.
Signataires : Kay Fanm, Solidarite fanm ayisyèn – SOFA, Fanm Deside, Asosyasyon fanm solèy d Ayiti – AFASDA ; Fondation TOYA, Sabine Manigat, féministe indépendante.
Pour authentification
Danièle Magloire, Kay Fanm
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