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Depuis plusieurs années, la multiplication de forums et de conférences censés intégrer la diaspora haïtienne dans les dynamiques politiques nationales n’a cessé de se heurter à une impasse : celle de l’absence de mécanismes institutionnels durables et inclusifs. Des rencontres stériles, synonymes d’un gaspillage manifeste de fonds publics, dépourvues de toute perspective durable, en raison de l’absence de représentativité sérieuse et de la légitimité aussi bien que de la crédibilité des participants, continuent d’émailler le paysage politique haïtien.
À cet égard, le Forum national de la diaspora haïtienne, tenu du 9 au 11 septembre 2024 à Washington, DC, offre un exemple significatif de cette dynamique infructueuse. Annoncé avec emphase comme une étape décisive pour renforcer la participation citoyenne des Haïtiens vivant à l’étranger, cet événement rassemblant des leaders de divers continents avait pour ambition de définir un cadre stratégique d’action pour accompagner la transition politique d’Haïti. Les débats interactifs, les résolutions ambitieuses et la désignation d’un représentant de la diaspora n’ont, cependant, produit aucun effet tangible ni modifié de manière substantielle les dynamiques de pouvoir en Haïti. La démarche, pourtant empreinte de bonne volonté, s’est heurtée à la réalité d’un processus dépourvu de fondations institutionnelles solides, incapable de garantir la mise en œuvre effective des résolutions adoptées.
Dans la même veine, la 14ᵉ édition de la Journée nationale de la diaspora, organisée à Port-au-Prince en avril 2025 et clôturée à la date marquant le premier anniversaire du Conseil Présidentiel de Transition (CPT) — un régime vivement contesté pour son incapacité manifeste à enrayer l’insécurité — s’est traduite par une rhétorique consensuelle exaltant l’apport historique de la diaspora, sans pour autant se traduire par l’adoption de mesures concrètes assurant sa participation effective à la gouvernance nationale ou aux prochaines consultations électorales. Bien que le Premier ministre de facto, Alix Didier Fils-Aimé, ait affirmé la volonté de l’État de renforcer les liens avec la diaspora dans une perspective inclusive, les actes politiques concrets se font encore attendre, rendant ces engagements largement déclaratifs.
Ces initiatives, si elles témoignent d’une reconnaissance symbolique de l’importance de la diaspora dans la vie nationale, reconduisent en réalité une pratique ancienne : celle d’organiser des forums prestigieux, coûteux, mais déconnectés des mécanismes de transformation institutionnelle effective. Loin de jeter les bases d’une refondation nationale authentique, elles entretiennent l’illusion d’un dialogue inclusif tout en reconduisant les logiques d’exclusion et d’inefficacité qui minent la gouvernance haïtienne depuis des décennies.
Ainsi, la répétition de telles rencontres sans lendemain pose une interrogation fondamentale : faut-il continuer à multiplier des forums, colloques et cérémonies sans exigence réelle de redevabilité, ou repenser en profondeur les modalités de la participation citoyenne, en privilégiant des mécanismes institutionnalisés, transparents et vérifiables ?
cba